"Faut-il oublier le passé pour se donner un avenir ?"

Publié le par ShX

C'était la question du BAC de philo de cette année.

 

Voici la réponse que j'ai échafaudée à ce propos :

 

Qu'est-ce que l'avenir sinon qu'un futur passé ?
Oublier le passé, c'est oublier un futur.
Logiquement-parlant, c'est une absurdité.
Scientifiquement-parlant, il manque une donnée : à quel moment se pose-t-on cette question ?
Le temps de se la poser, cette question fait déja partie du passer. Faut-il l'oublier alors qu'on se la posait pour réfléchir à son avenir ? La encore c'est un paradoxe amusant.
Philosophiquement parlant, de nombreux philosophes se sont interrogés sur la questions. Pour ne pas les citer tous, je ne citerais que ceci :
"Le temps, c'est de l'argent", Al Capone.

Cela nous permet d'aborder la question sous un angle économique : "Faut-il oublier l'argent passé pour [se construire un capital fictif] ?"
Résolument, n'importe quel exemple de la vie de tous les jours donne une réponse très claire : allez voir votre banquier - institution incarnant toutes les "valeurs" (ou plutôt LA valeur) de notre société actuelle - et demandez-lui un prêt sans avoir de capital. Vous comprendrez bien vite que si les banquiers RulZ the world, c'est bien parce que ce sont des philosophes hors-pair ! La preuve, ils se feront un grand plaisir d'aller fouiller dans votre passer pour vous voler votre avenir.

Alors vous leur sortez votre réponse à la question sur l'aspect accomplissement de soi : le passé et l'avenir ne sont qu'un. Chaque évènement du passé est une pierre de plus à l'édifice du futur, et construire un futur sans passé, c'est comme vouloir rajouter un étage à votre maison tout en détruisant le rez-de chaussée.

Une maison ou un gratte-ciel, c'est selon vos ambitions.
L'Ambition. Cette valeur véhiculée et adulée par notre société méritocratique. Cette poursuite sans fin d'un objectif toujours plus haut, cette pression imposée à une multitude de personnes par une minorité puissante parce que riche, qui se pavane et tente de construire son avenir en oubliant le passé.

Pour ne citer qu'elle, prenons la parabole de la Tour de Babel, de Jesus de Nazareth, un philosophe plus que connu, né en l'an zéro (-2 pour être exact). Est-il utile de la rappeler ici ? Vous qui me lisez, avez-vous su tirer du passé les leçons pour préparer notre avenir ? Définitivement non. Car vous êtes professeur de philosophie. Et le philosophe, s'il doit savoir s'étonner et s'interroger sur ce qui l'entoure, doit aussi - en tant qu'ami de la sagesse - savoir tirer partie de la sagesse et des réflexions exprimées par ses pairs par le passé.

En ce sens, je suis peut-être un mauvais philosophe, car je ne saurais citer BHL mieux que Raffarin ("The yes against the no...") ou Antoine ("Dépend-il de nous d'être heureux") mieux que Joey Starr ("Laisses moi zoum-zoum-zen, dans ma  benz-benz-benz"), mais je m'interroge sur un dernier point :

Qui "nous" donne un avenir ? Notre avenir n'est-il pas une configuration d'une quantité d'évènements tellement fantasmagorique qu'il serait illusoire de penser qu'une personne puisse nous donner UN avenir bien précis ?
Notre avenir est donc décidé par ce que nous faisons de notre passé, et vous comme moi savons que le passé fait partie intégrante du futur. Mais il est aussi - et surtout - décidé par le choix que feront les milliards d'autres personnes qui cohabitent avec nous sur la planete.

Pour finir sur un exemple concret : Les bleus peuvent tenter de "se donner un avenir [différent] " en "oubliant le passé", mais leur avenir sera décidé par ce que fera le reste du monde : oublier qu'ils auraient pu se donner un avenir s'ils avaient sû tirer des leçons du passé ("le passé"), ou pas.

Notre avenir à un instant donné dépend de celui que se donne le reste de notre univers [proche], et si la [majorité] ne tire pas de sagesse de son passé, elle condamne notre futur à retourner dans le passé.

Pour s'amuser, observons que si l'on oublie le passé pour penser au futur, le futur devient notre passé, car ne pas tirer de leçons de [ses erreurs] nous condamne à les reproduire.

Donc lorsqu'on cherche à se donner un avenir on pense au passé (sans s'en rendre forcément compte), donc il est en vérité IMPOSSIBLE d'oublier le futur pour se donner un avenir.

Cette dissertation n'a donc pas de sens, si ce n'est que celui d'aboutir sur cette citation de cet auteur / compositeur / interprète de génie qu'est Matthieu Chédid - M - :

"Le futur ne s'oublie pas."

C.Q.F.D.

 

S.J.  : 20/20

Publié dans La connerie du jour

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